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le calice des unitariens

chaque communauté unitarienne arbore un blason ou un logo. Voici celui des unitariens qui sont regroupés au sein de l'Assemblée fraternelle des chrétiens unitariens (AFCU). Voir sur son site à la rubrique "le calice des unitariens"
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28 septembre 2011 3 28 /09 /septembre /2011 15:06

suite des articles précédents


Dans son analyse des citations coraniques, Peter Hughes a pu établir une corrélation précise entre le travail de Servet et les sources qu’il utilisa, par exemple lorsqu’il tomba sur une numérotation erronée des sourates et qu’il suivit  fidèlement, ignorant que le Coran utilisait une autre numérotation. Ce n'est pas notre tâche ici d'entrer dans les détails des citations, donc nous nous en remettons à l'article cité qui nous sert de référence, mais nous mentionnerons quelques cas où Servet a pris une certaine liberté d'interprétation. Par exemple, il prend la sourate 40, bien qu'il croit qu’elle soit la 50, à cause des erreurs d’édition sus mentionnés déjà discuté, et cite : « Nous croyons en un seul Dieu, et non à ces partenaires superposées » (Servet, 1980, p. 167). Comme cette citation apparaît  à la suite d’une série de citations qui critique la théologie chrétienne de la Trinité, on peut entendre que ces « partenaires » sont les personnes divines inhérentes au dogme trinitaire. Toutefois, dans le contexte coranique, cette citation ne fait pas allusion à la Trinité, mais, selon diverses interprétations du texte, plutôt à l'ancienne religion polythéiste d'Arabie, ou peut-être encore à une compréhension de Dieu fondée sur la raison humaine ou d'autres éléments que des gens ont «associé» à l'idée de Dieu, au lieu de se confier en la pure révélation (pour lire la citation dans son contexte, voir l'édition du Coran de Julio Cortés, p. 548). Cependant Servet, dans sa recherche d'arguments anti-trinitaires dans le Coran, se serait, quant à la signification du texte, laissé abusé par la traduction inexacte de Robert et par ses propres attentes.

 

Bien que la majeure partie des citations coraniques sont concentrés dans ce passage du premier livre de la « Restitution », ce n’est pas et de loin l’unique endroit ou Servet fait référence à l’islam et aux croyants musulmane que, selon la coutume de l’époque en Europe chrétienne, étaient appelés « Sarrasins » ou « Turcs ». Servet se réfère à l'islam ou les croyants musulmans, selon la coutume de l'époque dans l'Europe chrétienne, appelée «Sarrasins» ou «Turcs». Déjà, dans Dialogues sur la Trinité, il fait des  références directes à la foi islamique, comme celui que nous trouvons particulièrement intéressant (Servet, 2004, p. 393) :


« Par ailleurs, je te dis que, en dehors du Christ, tu n’adoreras pas plus Dieu que ne l’adore un Turc. Et tous ceux qui, en dehors du Christ, maintiennent une vision et une adoration de Dieu, l’adorent comme le font les Sarrasins, lesquels disent que se convertir à Christ est inutile. Mais moi j’affirme que Dieu est vu et adoré seulement en Christ … ».


Tout d'abord, l'attention du lecteur attentif est attirée sur le fait que Servet affirme qu’un Turc adore Dieu autant qu’une autre personne peut le faire. Comme nous l’avons vu, dans la plupart de la propagande anti-islamique de l'époque l'islam était une religion non seulement erronée, mais fondamentalement mauvaise, et seuls les plus condescendants la considéraient comme une hérésie dérivée de l'arianisme.


Servet classe les croyants musulmans dans le groupe de personnes qui, même sans connaître le Christ, adorent le Dieu. L'autre groupe qui serait hors de la « Nouvelle alliance » apportée par Jésus, serait la religion d'Israël, qui avait reçu la première révélation et l’avait transmise à travers la Torah, et a été soumise à la loi.  Et assurément, parmi ceux qui « en dehors du Christ maintiennent une vision de Dieu », Servet inclut certainement aussi les païens les mieux considérés par l’opinion chrétienne, comme Sénèque ou Socrate,  ceux dont on croit qu’ils suivent la volonté de Dieu bien que d’une manière inconsciente, ainsi que l’avait suggéré le Réformateur Zwingli dans son livre Exposition de la foi (Stephens 2005, p. 291).


Nonobstant, dans ce fragment, Servet montre clairement que, pour lui, c’est seulement dans le Christ que Dieu se révèle pleinement, ce qui devrait nous faire réfléchir face à certaines déclarations hâtives selon lesquelles Servet essayait de contenter les juifs et les musulmans avec sa théologie unitarienne, en ayant l’intention de construire un christianisme qui soit acceptable aux croyants des autres religions. Comme nous le verrons dans nos conclusions, le but de Servet est beaucoup plus ambitieux que cela. En revenant à la Restitution, à la fin de ce livre, il dit :  « Qui, sinon quelqu’un qui est sur le point de devenir fou, peut tolérer semblables logomachies sans être secoué de rire ? Même dans le Talmud ou le Coran, il n’y a pas de blasphèmes si terrible » (Servet 1980, 181). Il insiste ici, en faisant recours à la rhétorique, pour ridiculiser jusqu’à la moquerie les élucubrations des soit disant « philosophes » qui ont dévié la doctrine chrétienne originale, spéculations qu’il qualifie de blasphèmes.


Bien que le texte semble être une allusion négative aux livres des religions juive et musulmane (et observons que Servet se réfère au Talmud, qui est postérieur au Christ, et non à la Torah), en réalité c’est principalement  une reprise de la condamnation des enseignements trinitaires, en les rendant encore plus reprochables que l’enseignement de ceux qui ne reconnaissent par Dieu en Christ.  Cette supériorité des croyances des autres religions sur ceux que Servet appelle les sophistes, est de nouveau constaté dans le livre II où il dit que « les Juifs, les Turcs et autres païens » peuvent voir Dieu à égalité avec les chrétiens, mais que les soi-disant sophistes « ne voient ni n’entendent absolument rien » (Servet 1980, pp. 262-3).


Cependant, c’est dans le livre II de la 4ème partie de la Restitution, ou Servet traite plus à fond de l’islam, laissant de côté les spéculations trinitaires  et se concentrant sur les pratiques religieuses concrètes. Il part de la supposition que Mahomet s’inspira de la Bible pour dessiner sa propre religion, en recherchant des éléments différenciateurs qui eussent une base biblique, mais en les modifiant pour donner un caractère spécifique à la foi musulmane. Comme nous le voyons, c’est une variante de la vieille théorie de Jean Damascène sur le moine arien qui aida Mohammed. A partir ce point de départ, il traite des divers aspects de la religion musulmane comme des « adaptations » de la religion originale, qui serait la juive, puisqu’il qu’il considère que l’islam, d’une certaine façon, est une variante ou une dérivation de celle-ci. Même dans un certain passage, il affirme que Muhammad a "volé" des traditions de la Bible, ce qui le pousse à jeter des accusations de sacrilège.


Ainsi, c’est sûr que le vendredi a été pris comme « jour de repos » pour les musulmans sur le modèle du sabbat juif (cette citation et les suivantes de ce paragraphe sont de Servet, 1980, p. 633ss). Toutefois, Servet ignorait le vendredi n'est pas vraiment un jour de repos complet dans le style juif, mais le jour du culte public. Bien que toutes les modifications ne lui paraissent pas reprochables ; par exemple, il fait l’éloge de l’instrument qui appelle à la prière», « Muhammad, voyant que les Juifs avaient des cornes et nous des cloches, décida que dans ses mosquées ou temples la convocation se ferait avec la voix humaine, afin que cela fusse plus noble ». Sur les interdictions alimentaires, Servet crut que Mahomet interdit le vin à l'imitation du pape, qui refuse la viande et le mariage, mais là encore, de nouveau, il parle sur un ton élogieux du Prophète pour avertir que cette interdiction coranique a un fondement biblique, justification qui manque en ce qui concerne les interdictions du pape. Quant aux prières, Servet fait une curieuse déclaration selon laquelle elles sont cinq dans l'islam comme un moyen terme entre les trois de la religion juive et sept heures canoniques chrétiennes.
 

à suivre ...

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